Tournai: Pascal Duquenne fait son show
Ensemble, même si on est différent. C’est le slogan de Cap 48. C’est aussi le message véhiculé, à Tournai, lors de la venue de Pascal Duquenne. L’acteur du 8ème jour, atteint de trisomie 21, a rendez-vous cette fin de semaine avec 1000 élèves de l’enseignement libre. Pour leur montrer une autre facette du handicap et répondre à leurs questions sans tabou.
Vous avez vu le Huitième jour?” “Noooon”, répondent-ils en choeur. “Mais mon papa a le DVD!”, précise une petite fille, “impatiente de voir le film”. Aujourd’hui, ils accueillent quelqu’un dont ils connaissent à peine le nom. A part avoir tourné des films au cinéma, ils ne savent pas ce qu’il est capable de faire. “Moi, jusqu’ici, quand on me parlait de personnes handicapées, je voyais des gens en chaise roulante qui poussaient des cris”, avoue un enfant.
Quand Pascal Duquenne entre en scène, l’étonnement est total. “Qu’est-ce qu’il danse bien!” s’exclame une fillette. “C’est marrant quand il fait le cow-boy” ajoute sa voisine. Un autre a préféré voit Pascal à l’oeuvre, sur sa table de dessin. En 5 minutes, il a fait deux croquis. “Vraiment pas mal du tout”, apprécient un enfant. Le public verra ensuite toute une série de peintures, gravures et dessins faits par Pascal ces dernières années. “C’est vraiment une grande passion”, explique la “vedette du jour”. Qui précise tout de même que ce qu’il adore, c’est la batterie. Son show, sur scène, aura beaucoup de succès. En quelques titres, lui et ses acolytes se mettent le public dans la poche. C’est le délire à la fin d’un célèbre titre de Zaz…!
Une séance de questions-réponses succède au spectacle…Tout le monde veut interroger Pascal Duquenne. “A-t-il une petite amie?” “Est-il allergique au chocolat? ” (“Mais non”, répondra Pascal en montrant son ventre. “C’est dommage pour mon régime d’ailleurs”). Aux questions plus anecdotiques succèdent d’autres sujets plus graves. La maman de Pascal, Huguette (alias Mamy Cacahuète), explique en toute simplicité les difficultés qu’elle a rencontrées, dès la naissance de “son petit chinois”. Elle raconte la froideur des médecins, leurs paroles cinglantes. “Ils m’ont dit que Pascal était un mongol. C’est comme ça qu’on appelait les trisomiques. Selon eux, je ne devais pas m’en faire: il n’allait pas vivre longtemps, il suffisait de le placer dans un home. Et ça, j’ai toujours refusé! Je me suis battue pour qu’il ne soit pas placé”. Les élèves sont bouche bée, avec de petites larmes, parfois, au coin des yeux. Ce matin, quelque chose s’est passé. Mieux qu’un slogan sur “la différence”, la rencontre avec l’acteur trisomique les a touchés. “On a compris qu’une personne handicapée pouvait faire un tas de choses”. “On a tous un handicap, finalement. Chacun le sien. Moi et l’écriture ça fait deux.” “Moi ce sont mes yeux, je porte des lunettes”. “Moi je mange trop…”.
“Cette rencontre n’est qu’un début”, conclut Pierre Deschodt, le directeur du Saulchoir (une école d’enseignement spécialisé). “Toute l’année, nos élèves vont se rencontrer. Des partenariats seront menés entre des classes de l’enseignement ordinaire et l’enseignement spécialisé. Il y aura par exemple des ateliers pour réaliser des oeuvres d’art à la manière de Pascal Duquenne, un gala de cinéma à la fin de l’année…”
Les écoles de l’enseignement libre comptent récolter des fonds au bénéfice de l’asbl “Le 8ème jour”. Créée en 2000 par des parents, dont ceux de Pascal Duquenne, l’association propose à des handicapés légers de vivre en autonomie, dans des appartements groupés. A l’heure actuelle, l’asbl possède quatre immeubles à Bruxelles. “On a de la place pour 30 personnes handicapées, seules ou en couple” nous explique Huguette. “Des familles vivent aussi à leurs côtés, des personnes valides, solidaires”. Le rêve d’Huguette? “Une cinquième maison, pour nos résidents qui vieillissent. Ce serait un immeuble plus médicalisé, qui permettrait d’éviter de les envoyer dans des homes”.
Charlotte Legrand